Espèce d’espace

C’est avec Georges Perec que vous écrivez, ce samedi aux Buttes Chaumont, pour tenter de saisir un peu de la vérité de ce lieu où nous nous retrouvons pour la deuxième fois.

Avec Georges Perec et sa recherche sur l’espace

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Avec Georges Perec et son travail sur l’infra-ordinaire (vous pouvez découvrir l’intégralité du texte dans cet hommage signé remue.net) :

Approches de quoi ?

« Les journaux m’ennuient, ils ne m’apprennent rien ; ce qu’ils racontent (…) ne répond pas aux questions que je pose ou que je voudrais poser.
Ce qui se passe vraiment, ce que nous vivons, le reste, tout le reste, où est-il ? Ce qui se passe chaque jour, le banal, le quotidien, l’évident, l’ordinaire, l’infra-ordinaire, le bruit de fond, l’habituel, comment en rendre compte, comment l’interroger, comment le décrire ?
(…)
Interroger ce qui semble tellement aller de soi que nous en avons oublié l’origine. Retrouver quelque chose de l’étonnement que pouvaient éprouver Jules Verne ou ses lecteurs en face d’un appareil capable de reproduire et de transformer les sons. Car il a existé, cet étonnement, et des milliers d’autres, et ce sont eux qui nous ont modelés.
(…)
Il m’importe peu que ces questions soient, ici, fragmentaires, à peine indicatives d’une méthode, tout au plus d’un projet. Il m’importe beaucoup qu’elles semblent triviales et futiles : c’est précisément ce qui les rend tout aussi, sinon plus, essentielles que tant d’autres au travers desquelles nous avons vainement tenté de capter notre vérité. »

Approches de quoi ?

Quelques fragments d’espace cueillis par vous cet après-midi-là :

« Des grappes de passants par dizaines.
La nature qui semble s’effacer devant cet envahissement. L’herbe est douce, verte, accueillante et désordonnée. Au loin, un groupe de gens s’attarde sur la passerelle étroite.
Le parc des Buttes Chaumont, ce sont aussi des couleurs, des effluves discrètes. L’herbe fraîche, la sueur, le vin. Le parc des Buttes Chaumont, c’est une mosaïque humaine et des origines diverses, un parfum de jeunesse et de nonchalance.
Comme cet homme qui s’expose, sans gêne, repu de soleil.
Ce doit être le cèdre du Liban où les jeunes gens qu’il abrite avec bienveillance.
Il me semble, l’espace d’un instant, que je me trouve sur un campus Californien, pas très loin du Japanese garden.
Ça se bécote, ça complote et ça s’embrasse dans toutes les langues.
C’est ça le charme des Buttes Chaumont, être ici et ailleurs. »
Léa

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« Des chiens jappent en toute liberté, balayant l’air d’une queue enthousiaste. Ce que cherchent les parisiens et leurs touristes est là : déambuler à son rythme, s’asseoir au frais ou en plein cagnard seul ou en groupe ; amener le chien en balade, mamie en fauteuil roulant ou bébé en poussette ; immortaliser le mariage du samedi par des photos réussies… Les enfants du samedi pédalent, patinent sans heurts sous la surveillance distraite des parents. Une femme s’allonge sur un banc, son voisin aveugle se tient droit, les mains appuyées sur la canne blanche verticale.
Et toujours, partout, les arbres aux noms et provenances multiples. Les troncs monumentaux et les sous-bois en plein Paris.
Ne plus entendre la ville, profiter de la chanson des oiseaux ou du murmure limpide de la cascade. Tout est là. »
Brigitte

« Ce qui m’empêche de profiter de la beauté de ce parc, ce sont ces promeneurs qui arpentent les allées, bavards polyglottes, belles au regard protégé de verres fumés à l’affût de celui, admiratif, des garçons croisés, couples enlacés, étrangers à ce qui les entoure, touristes affublés de sacs à dos et de caméras, solitaires en chasse, familles bruyantes d’enfants éparpillés, processions qui se déroulent sans but affiché.
Mais par-dessus tout, ce sont les bruits, timbres de voix fugaces, accents étrangers, mots perdus portés par le vent qui s’accordent avec le babillage des oiseaux, le grognement de la ville toute proche et la grosse caisse qui rythme les pas. Cette cacophonie vient se heurter au silence immobile des arbres.
À leur densité répondent ces amas bigarrés de la grouillante humanité qui occupe tous les espaces, taches mouvantes et lumineuses sur fond de verdure. »
Lisette

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« Des vélos, des trottinettes, des poussettes, des rollers, et même des caddies et des promeneurs qui s’entrecroisent dans une improbable chorégraphie.
Du français accroché, de l’arabe décliné de milles musicalités, du chinois, de l’espagnol, du russe, du polonais et toute la suite en langues de l’est majeur : concert d’espérance.
En un carré d’herbe, le monde. »
Annpôl

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« Regarder autour de moi.
Je dérive de suite dans le mouvement ou l’immobilité des visiteurs. Et passerai plus d’une vingtaine de minutes en cet endroit, hypnotisée par la grande pelouse parsemée de corps de toutes couleurs, dans toutes les positions, et emportée par le tourbillon des visiteurs. Arrivant tout juste à noter ce qui arrive et m’arrive. Envahie de visions et de sensations. Je tiens bon, le crayon suit comme il peut. Je sens encore sa vitesse ! J’essaie de tout noter. La tête va et vient entre ce que je vois et mon cahier. »
B.

Préparation de l’atelier des Buttes Chaumont

Écrire aux Buttes Chaumont, repérages

        Je suis dans les livres, je prépare l’atelier…

66 le temps de les retrouver

   … je laisse les livres, rejoins le parc derrière des grilles…

46 depuis l'avenue bolivar                                8 frontières

(s’agit-il d’une frontière ?)

                    47 un croissant de lune                                      48 pavillon du brigadier

j’entre par la porte Bolivar…       déjà le chant des oiseaux autour du pavillon du brigadier…

             ai-je quitté la ville ?

 « Décrire l’espace : le nommer, le tracer, comme ces faiseurs de portulans qui saturaient les côtes de noms de ports, de noms de caps, de noms de cirques, jusqu’à ce que la terre finisse par ne plus être séparée de la mer que par un ruban continu de texte. »

 je fais le tour par les hauteurs côté Simon Bolivar…

          51 vers les hauteurs                15 ah les beaux arbres     67 arbres

je le croise lui,      22 pas mal    puis   23 elles   43 des copains et  eux…          64 être là

  « Il n’y a pas un espace, un bel espace, un bel espace alentour, un bel espace tout autour de nous, il y a plein de petits bouts d’espaces »

… des couleurs, des odeurs, des cerisiers en fleurs…

61 couleurs    53 couleurs          21 y revenir

« Travaux pratiques.

Observer la rue, de temps en temps, peut-être avec un souci un peu systématique. S’appliquer. Prendre son temps. »

 

   42 celui du repos      26 mon coin      18 en amérique ils disent séquoias

       …  le sequoia d’Amérique, le sophora penché sur l’eau, le févier, le noisetier de Byzance, l’orme de Sibérie, les cèdre du Liban, le saule et les deux ginkgos bilobas, les hêtres pourpres… les reliefs abruptes,  le belvédère, le temple, le pont suspendu…

 

       44     33 ou encore ça

 « Ou bien, plutôt, découvrir ce que l’on n’a jamais vu, ce qu’on attendait pas, ce qu’on imaginait pas. »

Une profusion de signes dont je n’ai saisi qu’une infime partie.

Jean-Charles Alphand est à l’origine de ce jardin inouï.           30 c'est à lui qu'on doit ce jardin magnifique

                                              Il a voulu ce temple,

  32 aujourd'hui ça donne ça               où veille la Sybille.            65 ce que révèle la photo

 

« Notre regard parcourt l’espace et nous donne l’illusion du relief et de la distance. C’est ainsi que nous construisons l’espace : avec un haut et un bas, une gauche et une droite, un devant et un derrière, un près et un loin. »

 

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Le livre avec moi : Georges Perec, Espèces d’espace.

Vous pouvez lire ici un texte écrit sur ce jardin : Un jardin dans la ville