Avec Edmundo Gómez Mango

« La force du langage est de chercher ce qui n’est pas en lui »

écrit Edouardo Gómez Mango — auteur d’origine uruguayenne exerçant la psychanalyse à Paris — lorsqu’il explore la relation fondamentale que l’homme entretient avec le langage.

    « Le génie de chaque langue est essentiellement musical. Les écrivains sont de grands « oídores », « ouisseurs », des « écouteurs monstrueux », dit Roland Barthes. Ils sont souvent attirés par la sonorité des langues étrangères qu’ils ne connaissent pas. Joyce se rendait à la gare à l’arrivée des trains internationaux, pour écouter furtivement, comme un voleur, les voyageurs qui descendaient et parlaient des langues étrangères. »

Ailleurs, dans un autre livre, ceci, non plus sur le chant des langues mais sur l’eau de l’écriture :

    « Lire, écrire : plus qu’apaiser la nôtre, c’est la soif de l’eau de l’écriture qui semble ainsi s’apaiser ; c’est elle et son courant d’images qui nous enlève, nous déborde et nous dissout ; c’est elle qui boit nos ombres et s’abreuve à nos fantasmes. »

Edmundo Gómez Mango, Un muet dans la langue (Gallimard, Connaissance de l’inconscient, 2009), et La Place des mères (Gallimard, Connaissance de l’inconscient, 1999).
A propos d’Un muet dans la langue, lisez la lettre d’un regretté ami, précieux lecteur, Ronald Klapka : Lettre de la Magdelaine.

Vous pouvez aussi écouter l’auteur parler, sur France Culture, de La place des mères.

A Manosque, pendant Les correspondances, on ouvre les fenêtres sur le vent des mots

Écrire – 2

Écrire est une façon de regarder.

« Où mène ce que je suis entrain de faire ? Si je savais où ça mène, je ne l’écrirais pas. Parce que, écrire, c’est ça : partir sans savoir où on va arriver. Sans même savoir si on arrivera quelque part. Écrire est un art immobile, me dis-je. Et je ne sais même pas ce que ça veut dire. »

Avec Carlos Liscano, dans L’écrivain et l’autre, Belfond.

« Les gens marchent, bougent, parlent, quelqu’un sonne à la porte d’une maison, une jeune femme passe, une petite fille dans les bras. C’est la réalité, le monde, tout est mû par un secret espoir, une raison. »

Écrire est une expérience avec le langage.

« Refréner l’impatience. La création est un travail lent. La plupart des jours se passe en répétition, en accumulation. Parfois, en un instant, un saut a lieu, et c’est là. On sent alors qu’on a fait quelque chose, même s’il ne faut pas le croire tout à fait. »

« L’art est un moyen de trouver un sens à l’étonnement d’être au monde. »

Écrire ? Regarder ?

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Avec François Bon

Parmi les passeurs qui transmettent l’écriture en ateliers, j’aime retrouver les convictions qui sont les miennes – ici c’est avec François Bon

« Nous assumons collectivement la responsabilité que les mots ne soient pas un amusement séparé du monde, mais portent une charge d’être vitale. »

L’atelier, un lieu où chacun vient jouer de soi dans son rapport avec le langage.

« L’atelier d’écriture, si on met l’accent sur cette diction du monde, est toujours une prise de risque dans le rapport individuel au monde. (…) Énoncer ce qui est beau, souligner ce qui est important, faire chanter la langue et faire entendre son souffle, doit l’emporter : à nous de faire comprendre en amont, de permettre une progression suffisamment mesurée pour qu’affronter ce risque soir aussi de l’apprentissage. »

Écrire depuis l’ouverture, le doute, l’inconnu.

« Rester au cœur du rapport à ce que l’on énonce. Trouver ce prisme, y laisser le curseur. »

Lire : Tous les mots sont adultes

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